ENJEUX ÉDUCATION

S’inspirer du succès de l’école privée

Donnons au système d’éducation public les moyens de répondre aux besoins de sa clientèle

C’est la rentrée et, avec elle, l’éternel débat sur l’éducation au Québec. Chacun a sa vision, mais on s’accorde généralement sur un point : le privé fait mieux.

Pourquoi ne pas prendre exemple sur le réseau des écoles privées ? Essayons de trouver les causes de ce succès et, qui sait, peut-être pourrait-on s’en inspirer pour améliorer le réseau public.

Savez-vous ce qu’ont en commun la grande majorité des élèves fréquentant le privé ? Ils mangent à leur faim. Ils déjeunent le matin et ont un lunch consistant. Du moins, ils en ont les moyens. C’est prouvé qu’il est fort difficile de se concentrer sur l’apprentissage quand on a le ventre vide, surtout quand la faim est chronique. Pour imiter le succès du privé, il faudrait donc premièrement que les élèves du public mangent à leur faim. Il en va de même pour la sécurité de logement et les vêtements. Les besoins fondamentaux, quoi.

Savez-vous pourquoi le climat est plus paisible au privé ? Simplement parce qu’ils expulsent ceux qui ont un comportement trop perturbateur. L’enseignant peut donc transmettre sa matière plutôt que de perdre un temps fou à gérer sa classe. Évidemment, le système public ne peut pas renvoyer ces enfants. La loi le lui interdit. Il n’en reste pas moins que pour imiter le succès du privé, il faudrait que les enseignants puissent se concentrer sur leur tâche principale.

Il faudrait donc davantage de ressources et de spécialistes pour s’occuper des cas problèmes.

Remarquez que les problèmes ne sont pas seulement comportementaux. Ils peuvent aussi se référer à l’apprentissage. Là encore, ces troubles brillent par leur absence dans le réseau privé. Comparé au réseau public, le pourcentage d’élèves ayant un trouble d’apprentissage est homéopathique au privé. Mais qu’arrive-t-il dans le rare cas où un élève du privé a une difficulté d’apprentissage ? On consulte aussitôt un spécialiste. Pour imiter le succès du privé, il faudrait donc pouvoir offrir aux élèves ayant des besoins particuliers les services dont ils ont besoin. Surtout quand on sait que ces spécialistes coûtent nettement moins cher dans le réseau public qu’en pratique privée.

On arrive dans la grande force du privé : sa flexibilité. Si un élève a besoin de services, il ne se butera pas à la rigidité et à l’immobilisme causé par les conventions collectives qui emprisonnent dans un carcan immuable le réseau public. Il devra se buter à la rigidité et l’immobilisme causés par les contrats qui emprisonnent dans un carcan immuable le réseau privé. Eh oui ! Parce que dans les deux cas, si on veut ajouter des tâches au fournisseur de service, il faut négocier. Tout se paie, au privé comme au public. Si quelque chose n’est pas prévu au contrat initial, il y aura surcharge. Il n’y a pas grand-chose à imiter ici.

Il reste une pratique du privé à explorer. Généralement, on affecte les défis proportionnellement à l’expérience et au talent démontré. Aucun patron ne confiera ses cas les plus difficiles au « p’tit nouveau ». C’est pourtant monnaie courante dans le système d’éducation publique. Les nouveaux enseignants sont envoyés dans les milieux défavorisés et dans les écoles à problèmes. Trop souvent, dès qu’un enseignant a assez d’ancienneté, il quitte ces milieux et prend un poste moins demandant.

Il serait facile de leur jeter la première pierre, mais ce serait hypocrite. Ils ne partent pas par manque de vocation, mais par manque de soutien. Ils ont « fait leur temps » et sont épuisés. Il serait simple de rendre ces postes plus attrayants en donnant une prime basée sur l’expérience aux enseignants qui restent dans des écoles plus difficiles.

C’est la formule du privé : plus d’expérience ou plus de talent, plus de défis, meilleure paie.

PAS SORCIER

Donc, imiter le succès du réseau privé ne serait pas sorcier. Il faudrait simplement s’assurer que les besoins fondamentaux des élèves soient comblés, laisser les enseignants se concentrer sur la transmission du savoir, offrir aux élèves ayant des besoins particuliers les services des spécialistes dont ils ont besoin et valoriser le travail en milieu plus demandant.

Nul besoin de réformes ou de nouveaux programmes ou d’autre solution magique. Il faut simplement donner au système les moyens de répondre aux besoins de sa clientèle.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.